Fake ou pas fake ?

La démocratisation de la contrefaçon

Dans un monde où l’accès aux tendances de la mode semble plus facile que jamais, un aspect sombre émerge : la montée en puissance de la contrefaçon. Une aubaine pour certains, une catastrophe pour d’autres, l’industrie du “fake” est un sujet très clivant.

À travers cet article, plongez dans les coulisses de l’industrie de la mode, en comprenant ensemble les raisons qui encouragent la popularité de ce marché, mais aussi comment la prolifération de produits contrefaits menace l’intégrité des marques.

Un peu de contexte historique…

Les copies existent depuis très longtemps, notamment dans les années 70 où Kinney Shoes, l’ancêtre de Foot Locker, vendait des fausses paires de Nike ou d’Adidas. Mais le phénomène qu’on connaît aujourd’hui existe depuis les années 90. En effet, suite à la mondialisation, les marques délocalisent leurs usines en Asie, où le coût de main-d’œuvre y est beaucoup plus faible. 

Elle va par la suite très vite se professionnaliser, ce qui lui permet de se propager en Asie, en Afrique et en Amérique du Sud, des régions du monde avec un faible pouvoir d’achat. Dans ces nombreux territoires, la contrefaçon est implicitement acceptée depuis de nombreuses années : officiellement interdite, mais en réalité officieusement tolérée par les gouvernements. Et elle est apparue tout aussi vite en Occident, d’abord grâce à la présence des mafias chinoises aux États-Unis, qui communiquaient facilement avec les usines chinoises, à une époque où Google Trad n’existait pas !

Depuis quelques années, l’explosion du e-commerce a permis aux particuliers la montée fulgurante de la revente de fakes. Des communautés se sont créées autour de ce sujet, puisqu’il existait une asymétrie d’informations entre ceux qui savent où acheter “des bonnes fakes”, et ceux qui sont totalement perdus. Leur point d’orgue est l’époque “hypebeast” de 2015 à 2017, où tout le monde désirait Supreme, Off White, ou encore Yeezy.

« En 2022, une étude indique que 37% des jeunes Européens âgés de 15 à 24 ans ont acheté intentionnellement au moins un produit contrefait au cours des 12 derniers mois… »
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO)

Mais pourquoi les jeunes achètent-ils de la contrefaçon ?

Il existe plusieurs raisons qui poussent les consommateurs à se procurer des imitations.

Tout d’abord, le prix : une paire d’Air Force 1 coûtait 80€ neuve il y a 20 ans contre 120€ aujourd’hui. La qualité n’explique pas du tout cette hausse, puisqu’elle n’a pas changé au fil des années, mais ces prix se banalisent de plus en plus avec le temps. En parallèle, les grosses marques comme Nike créent davantage de produits exclusifs : une “hype” est créée, de très faibles exemplaires sont produits, ce qui augmente considérablement la valeur de l’article, car la demande est beaucoup trop forte. Cela produit de la frustration chez le consommateur : certains sont donc prêts à payer le produit (beaucoup) plus cher que le prix initial. La collaboration entre Nike et Travis Scott est un exemple concret de cela : la paire de sneakers est passée de 200€ à près de 1000€, seulement de par son statut “convoité”.

Les revendeurs au “resell”, bien aidés par des plateformes comme StockX, sont les gros gagnants de ce phénomène, car ils achètent les produits au prix de base, pour les revendre par la suite plus cher. La solution logique serait alors de se ruer sur des alternatives moins chères, sauf que certains préfèrent acheter le fameux produit, même contrefait. Aujourd’hui, certaines fakes sont tout aussi qualitatives que l’original, ce qui pousse le consommateur à la contrefaçon.

Cependant, un gros problème est soulevé : certaines personnes, dont une bonne partie d’entre vous, n’ont pas du tout les moyens pour acheter sur le marché de la revente, voire même acheter des articles au prix du magasin. Cette situation accentue les inégalités sociales, vous forçant peut-être à vous tourner vers les répliques pour suivre les tendances.

Et les marques dans tout ça ?

Les marques ont une position très claire et négative à l’égard de la contrefaçon.

Tout d’abord, ces dernières subissent des pertes financières significatives en raison de la reproduction frauduleuse : chaque produit contrefait vendu représente une vente perdue pour la marque authentique. De plus, la lutte contre la falsification coûte très cher, de par les frais juridiques, les enquêtes et les opérations de saisie.

De ce fait, cela affecte énormément les marques dans leur image, surtout celles de luxe : leurs contrefaçons sont beaucoup plus populaires que leurs produits authentiques. Et ces produits contrefaits sont notamment très appréciés dans les quartiers populaires, comme la sacoche Louis Vuitton, la casquette Gucci, ou encore les t-shirts Lacoste.

Malgré les diverses campagnes de sensibilisation, le phénomène de la contrefaçon n’est pas près de s’arrêter : au contraire, il risque d’être davantage banalisé, surtout si les marques ne décident pas de revoir les prix pour les plus démunis d’entre vous.

Et vous, quel est votre avis sur ce sujet ?